Mazarinades
Des libelles et pamphlets de la Fronde parlementaire (1648-1649) que Gabriel Naudé collecta sur le moment, ainsi qu'il l'écrit dans son Mascurat (1649) et comme ses comptes d'acquisitions l'attestent, il n'est demeuré dans les archives et sur les rayons de la Bibliothèque Mazarine quasiment aucune trace, sinon une allusion furtive à la fin d'un inventaire des collections (fin XVIIe-début XVIIIe), mentionnant le stock non relié de la seconde édition du Mascurat et un ensemble de libelles qualifiés de si outrageants à la mémoire du cardinal Mazarin qu'ils n'étaient ni référencés ni décrits en détail. Au XVIIIe siècle, quelques dizaines de volumes de ces recueils factices constitués par des collectionneurs privés, pour les plus précoces dès le milieu du XVIIe siècle, firent leur apparition dans le catalogue du Collège des Quatre-Nations, probablement après la fin du règne de Louis XIV (1715), qui avait posé une chape de plomb sur ces pièces trop évocatrices d'une période douloureuse dans la vie et le gouvernement du grand roi.
En réalité, l'immense majorité de la collection actuelle provient des prélèvements opérés sous la Révolution dans les bibliothèques confisquées. Sur les quelque 2000 recueils factices ainsi récupérés, issus pour la plupart d'établissements ecclésiastiques parisiens (couvents, séminaires, chapitres, Collège de Sorbonne), environ 600 sont exclusivement composés de mazarinades, et maints autres en contiennent des exemplaires mêlés à des écrits de controverse religieuse ou à des pamphlets politiques. Cependant les bibliothécaires du XIXe siècle, souvent hommes de lettres peu attirés par ce type de texte, dédaignèrent le traitement de cet ensemble, laissé en vrac et dans l'indifférence, et ce malgré la publication en 1851 d'une bibliographie générale des mazarinades par Célestin Moreau, qui n'avait donc pu travailler à partir de la collection de la Mazarine.
Ce fut sous l'impulsion d'Alfred Franklin, qui avait peut-être lui-même intégré dans les fonds quelques dizaines de volumes entre 1860 et 1880 avant de devenir administrateur de la Mazarine, que cette collection d'environ 25 000 pièces, dont quelques manuscrits, augmentée entre-temps d'achats ponctuels, fut enfin examinée, dépouillée et inventoriée, travail confié à partir de 1887 à Armand d'Artois, précédemment conservateur de la bibliothèque des sociétés savantes. Par prélèvement dans les recueils d'un exemplaire, relié ensuite individuellement, de tous les titres censés être conservés par la Mazarine, fut constituée une collection de référence d'environ 5 500 pièces dont le catalogue mis à la disposition du public consista en un exemplaire de la bibliographie de Moreau que d'Artois avait annoté, en ajoutant soit simplement la cote soit de nouveaux titres qu'il jugeait pertinent d'intégrer au corpus. Dans la foulée du chantier de signalement, achevé pour l'essentiel au milieu des années 1890, d'Artois entreprit de combler les lacunes de la collection par un campagne de communication auprès des bibliothécaires, libraires et collectionneurs pour susciter échanges ou dons, mais dont les résultats furent modestes. L'entreprise s'interrompit avec le décès d'Armand d'Artois en 1912.
Le don reçu en 2011 des mazarinades et des archives de travail d'Hubert Carrier, un des principaux spécialistes au XXe siècle, qui projetait l'établissement d'une nouvelle bibliographie des mazarinades, est un des facteurs du récent regain d'intérêt pour ce corpus. A l'occasion du colloque international "Mazarinades : nouvelles approches" (Paris, 10-12 juin 2015), une exposition a été organisée sur le sujet par la Bibliothèque Mazarine, qui a donné lieu à une exposition virtuelle.
Ce corpus dispose depuis 2019 d'un nouvel instrument de référence en ligne, la Bibliographie des mazarinades.
Recherches internationales sur les mazarinades [en ligne : site Internet animé par Patrick Rebollar et Tadako Ichimaru, blog et corpus]
[BM :] Bibliographie des mazarinades. 2019-... [en ligne : https://mazarinades.bibliotheque-mazarine.fr]